Le Courrier de Tambour Major
Tambour Major vous répond !
Cher Armand,
Votre touchante lettre m’a beaucoup ému. Comment rester insensible à votre poignante histoire ? Mon cœur est tout abandonné à votre désarroi et je vous envoie mille baisers sur votre lit d’hôpital.
Avant toute chose, laissez-moi vous dire que nous ne jugeons pas nos lecteurs. Chacun n’est-il pas libre de faire ce qui lui plait ? Les sentiments les plus purs ne sont-ils pas les plus beaux ?
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Votre histoire d’amour avec Catherine est tout simplement touchante. Une relation de six ans qui s’éteint si brusquement et si irrémédiablement invite à s’interroger sur la cruauté de notre bas monde. Et, j’avoue que vous m’avez tiré les larmes des yeux lorsque vous décrivez, avec des mots qui sont les vôtres, ces longs après-midi de juillet passés avec votre chère et tendre, à pavaner dans les près d’herbe fraîche, à l’ombre du grand chêne. Ces instants idéaux où le temps semble s’être arrêté, suspendu en plein vol… moments extatiques pendant lesquels vous admiriez sans fin ses grand yeux doux, où elle blottissait sa tête contre votre épaule et … mais là cela devient trop intime pour nos lecteurs et je vous remercie cher Armand, de vous être confié de la sorte.
Comment en effet, résister aux tentations de la chair, dans un cadre si romantique et si propice, vos corps adonnés aux éléments ? Exhibitionnistes ? Je ne le crois pas et il ne m’appartient pas d’en décider. Mais peut-être avez vous franchi un cap et donné une autre dimension à votre couple le jour où vous avez commencé à vous filmer, puis à diffuser de courts extraits de vos ébats sur YouPorn…
Néanmoins, associer Glouglou le dindon à vos ébats me paraît quelque peu excessif… Et, à vous lire, Catherine semblait ne pas trop apprécier. Pas plus que Caramel votre berger allemand. Mais là n’est pas l’essentiel.
Car voyez-vous, cher Armand, la vie est ainsi faite que nous devons tous nous en aller un jour ; Catherine n’échappait pas à la règle. Nous sommes mortels, et certains d'entre nous plus que d'autres.
Aussi, je comprends parfaitement votre peine, ce funeste vendredi de septembre lors qu’est arrivé ce camion gris dans lequel Catherine est montée pour son dernier voyage. Ses mornes meuglements et son dernier regard en votre direction ont certainement constitué pour vous des minutes interminables. Je veux bien croire que vous ayez senti votre cœur voler en éclats de verres au moment où le convoi a repris son funeste chemin en direction de l'abattoir.
Interminable aussi cette première soirée passée seul avec votre peine et vos souvenirs. D’où certainement cette idée stupide que vous avez eue après avoir ingurgité le contenu d’une bouteille de vodka.
Franchement et en toute honnêteté : ne trouvez-vous pas ridicule, après coup, de vous être masturbé avec la trayeuse électrique ?
J’imagine la tête du chef d’exploitation lorsqu'il vous a découvert le lendemain, ivre mort et coincé, dans une situation pour le moins surprenante. J’imagine également celle des pompiers venus en renfort avec le SAMU sur injonction de la Centrale, et qui en ont profité pour vous sodomiser à coup de lance à incendie… J’espère au moins que cette petite mésaventure (vingt-cinq points de suture ? ça ne vaut pas plus) vous servira de leçon et que vous saurez dorénavant maîtriser vos pulsions intempestives !
Mais ne vous inquiétez pas cher Armand, quoi qu’inconsolable, soyez bien certain que Catherine vous regarde tendrement de là-haut, de tous ses grand yeux.
Tambour Major