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  • 24 août 2020

    Vivre pour soi

    La vie nous donne parfois des leçons bien cruelles. A sa manière à elle. C'est à dire frontalement. Comme un trente-trois tonnes lancé à pleine vitesse qui percuterait la vitrine d'un magasin de porcelaine. Il n'existe à mon sens que deux façons de réagir : recommencer comme avant, en espérant qu'un autre camion ne subisse pas la même avarie au même endroit ; ou changer de crèmerie. Ces derniers mois m'invitent à choisir la second issue.

    J'avais assisté au même phénomène avec mes parents voici quelques années. Confrontés de plein fouet aux drames de l'existence par la disparition brutale de certains de leurs proches, la vie s'était rappelée à eux. Elle leur envoyait un signal d'alerte et les sommait de vivre à pleines dents, tant qu'ils en avaient encore l'énergie. Le résultat fut spectaculaire et je suis très heureux pour eux qu'ils aient enfin appris à vivre pour eux, même s'ils demeurent des parents-poules par excellence. Voyager, profiter de leurs amis, se faire plaisir en vivant à la hauteur de leurs moyens et arrêter de se priver au-delà du raisonnable par simple peur du qu'en dira-t-on... Vivre pour soi.

    Il faut croire que, l'âge aidant, la roue tourne et que c'est à mon tour de vivre ces premières expériences. Cette année 2020 m'a pris tour à tour deux amis. L'un en plein confinement et que nous savions condamné. L'autre il y a quelques jours, fauché net en pleine force de l'âge. Les Parques ne connaissent hélas aucune pitié. De lui ne restent désormais que des photos de canyoning en Espagne, des souvenirs épiques de soirées mémorables passées à rire, celui d'avoir chanté à tue-tête dans une église désaffectée sur les bord d'un lac en Aragon, le souvenir désormais comique d'un tsunami de poussière sorti d'un vieil aspirateur tombé malencontreusement dans les entrailles d'une machine infernale, le son inimitable de sa voix... et beaucoup d'amertume. Le jour des obsèques, dans une très belle église du Tarn remplie de ses amis éplorés, je n'ai pas pu retenir mes larmes lorsque, du haut de la tribune, la voix suave du hautbois a commencé à déclamer sa mélopée sur une partition célèbre de César Frank. Tout s'est effondré autour de moi. Une sorte de vide immense, que je n'avais jamais ressenti auparavant m'envahit soudainement. De longues minutes s'écouleront avant que je ne puisse reprendre une contenance.

    De retour chez moi, et bien que rentrant à peine de congés, je cédais à l'anéantissement et sombrais dans un profond sommeil. J'étais terrassé par une insurmontable fatigue. Je m'endormais profondément, les chats-minous venus se blottir contre moi. Le surlendemain, je coupais le téléphone, faisais mes valises et partais rejoindre des amis lyonnais venus en rejoindre d'autres en Ariège. Bosser alors qu'il n'y a aucune urgence et que rien à part ma bonne conscience ne m'y oblige ? Et puis quoi encore...  Je partis donc les rejoindre. 

    Et ce fut une excellente décision. 

    Je passais avec eux deux jours formidables à faire le plein d'ondes positives dans une forme de complicité assez unique, à l'ombre bienveillante d'une vaste maison où vit un chat dont on m'a désigné tonton. Deux jours à me jouer du temps. Deux jours à me jouer de la bienséance de la Start'up Nation qui voudrait que l'on soit de bonnes petites fourmis ouvrières laborieuses et corvéables jusqu'à l'épuisement. Deux jours formidables comme le sont chacune de mes visites, tant les maîtres des lieux sont passés experts dans l'art de recevoir leurs hôtes comme des rois. 

    Se fit alors une forme d'évidence : il me fallait vraiment penser davantage à moi, profiter de la vie et des petites facilités matérielle dont je dispose, infiniment plus que je ne le faisais jusqu'alors. Arrêter de remettre au calendes grecques ou de me refuser ces mille petites choses qui me feraient plaisir au motif que ce ne serait pas convenable (convenable à qui  ? à quoi ?).  Que l'on soit cigale ou fourmis, l'issue est, au bout du compte, toujours la même. Professionnellement, cela veut dire me délester des pénibles, lâcher du leste, dégager les toxiques à coups de bulldozer, assainir mes relations aux autres, apprendre à travailler moins que ce que je ne devrais, et prendre beaucoup - beaucoup - de recul avec certaines choses dont je ne suis pas responsable.

    Samedi, de retour à la civilisation, j'ai franchi un cap. Je me suis enfin acheté cette cafetière automatique que je désirais tant depuis des mois et des mois. Des mois et des mois que j'hésitais faussement en essayant de me convaincre que je n'en avais pas besoin. Des mois et des mois que j'attendais à me décider sans franchir le seuil du premier magasin d'électroménager. Oh, certes non, ce n'est pas un besoin fondamental. Mais putain que c'est cool de sentir l'odeur du café fraîchement moulu le matin sans avoir douze manipulations à faire ! putain que c'est agréable de boire du très bon café chez soi à toute heure de la journée sans mettre de la mouture partout dans l'évier ou à côté de la poubelle. Ça aussi, ce fut une excellente décision.

    C'est ça, aussi, vivre pour soi. Savourer les petits plaisirs du quotidien et se bouger un peu le cul pour se donner les moyens d'accéder à ceux qui sont à portée de notre main. Profiter de chaque instant, se faire plaisir en vivant à la hauteur de ses moyens et arrêter de se priver au-delà du raisonnable par simple peur du qu'en dira-t-on... 

    Vivre pour soi. Tout simplement.

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