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  • 26 mai 2009

    Le bel inconnu de l'épicerie

    Au sortir de la salle de sport, après avoir souffert sous le poids de la fonte et évacué une bonne partie du stress de la journée, j'ai mes habitudes à l'épicerie d'à côté, tenue habituellement par une famille d'indiens ou de je ne sais exactement quelle nationalité. Commerce de proximité ouvert très tard la nuit, la boutique n'a rien de très extraordinaire. Il y fait toujours relativement chaud, été comme hivers, la fraîcheur des fruits et légumes est tout à fait approximative, et globalement les prix semblent bénéficier d'une certaine longueur d'avance sur les taux d'inflation des années à venir. Mais le poids des habitudes doublé d'une commodité certaine étant donné que je passe obligatoirement devant pour rentrer chez moi, me pousse régulièrement à y acheter selon mon humeur une canette de coca, une pomme ou un paquet de tranches de jambon de dinde à la saveur chimique à la limite du soutenable que j'avale pourtant avec un certain appétit : la muscu ça creuse !

    Ce soir je devais acheter du pain avant de me rendre chez Hélène pour y passer une soirée qui fut délirante (je vous raconterai ça tout bientôt) et comme un fait exprès, il se trouve que l'épicerie en question fait dépôt de pain. Ho non, ce n'est pas du Poilâne ni même du pain au levain subtilement alvéolé pétri par un artisan boulanger, mais du pain tout ce qu'il y a de plus industriel, façonné à la chaîne dans une usine de la banlieue toulousaine, du qui est tout sec le lendemain matin, tout bon à donner aux pigeons ou à transformer en chapelure.

    Souvent la caisse, située à droite de l'entrée, est tenue par l'un des membres de la famille : parfois celui que je pense être le fils du propriétaire, tout potelé et dont le sourire crispé fait davantage penser à une grimace ou une convulsion de douleur qu'à un signe extérieur de joie, ou encore l'un ou l'autre de leurs compatriotes, gentils mais sans plus, en tout cas jamais désagréable avec le client. Parfois c'est un grand black qui se la joue rebelle, très drôle et toujours en train de rigoler, exhibant un sourire qui lui biffe le visage d'un éclair extraordinaire. Je l'aime bien. Je ne sais pas comment il s'appelle mais chaque fois que je passe devant la boutique et que c'est lui qui tient les rennes, je lui adresse un grand coucou de derrière la vitrine, auquel il répond par un grand geste du bras.

    Ce soir donc j'entrai dans le seul but d'acheter du pain. La huche à pain est située immédiatement à coté de la table qui sert de caisse et masque de par sa hauteur la chaise de celui qui, à ce moment là, veille au grain. Avançant de quelques pas dans les rayons à l'affût de je ne sais quoi, je distinguai vaguement la présence d'une personne derrière le comptoir mais je ne crus reconnaître personne que j'avais pu y voir jusqu'alors. Constatant que finalement une baguette et une bouteille de coca light seraient mon seul butin, je me retournai et découvris alors avec bonheur celui qui était assis là.

    J'ai déjà évoqué dans un autre billet mon attirance pour ceux présentant les traits caractéristiques des populations du grand bassin méditerranéen et l'émoi incontrôlable que provoque l'une de ces rencontres du troisième type. Hé bien je puis vous assurer que mes sens en eurent une fois encore pour leur grade !

    Celui qui me faisait face devait être au moins aussi grand que moi, impression qui fut confirmée lorsqu'il se mit sur ses jambes. Plutôt mince quoique solidement bâti, les cheveux ébènes coupés courts soigneusement peignés sans maniérisme, un visage oblong des plus agréable au teint brun affirmé par deux grands yeux noirs respirant la douceur, il se dégageait de ce gaillard une sorte de force tranquille nimbée d'humilité, un charisme renversant qui faillit l'espace de quelques seconde me faire perdre pied, sublimant une beauté physique qui, quoiqu'elle se situât au dessus de la moyenne, n'en faisait pas pour autant un apollon de magazine.

    Reprenant mes esprits, je lui demandais une baguette de campagne que, se retournant, il saisit puis emballa dans une rectangle de papier blanc d'un geste calme, ample mais précis ; enfin, prenant une poche en plastique, y logea la bouteille de soda. " Ça fait 3 Euros 40 " et " Bonne soirée " furent les seuls mots qu'il prononça au cours de notre bref et impromptu tête à tête. Je n'ai aucun souvenir particulier de sa voix mais il est un fait que celle-ci ne m'a choqué ni par son timbre, ni par son intonation. Si en effet certaines personnes n'ont pas le physique de leur voix - à moins que ce ne soit l'inverse - soit qu'elle fut trop aiguë, trop grave, ou servie par une diction des plus étrange, je dois avouer que le plumage se rapportait ici parfaitement au ramage, appuyant par cet élément supplémentaire l'élégance générale de ce bel inconnu.

    Nous nous quittâmes sans plus de formalités, lui me saluant d'un clignement de l’œil conférant à cette entrevue expresse un cocasse semblant de complicité.

    Je ne sais pas pourquoi mais je crois que demain je retournerai faire du sport...


    Voir aussi par là.

    3 commentairess:

    1. Il est fort le Tambour Major ! Tout ça pour nous dire qu'il a acheté une baguette de pain rassis à 3 euros 40...

      L'art d'en faire des pages...

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    2. Ca ne nous dit pas si le lendemain il était là à nouveau...

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    3. @ L'Arno : il était bel et bien là. Il y est encore de temps en temps...

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    Bonjour, vous êtes bien chez Tambour Major.

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