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  • 21 février 2010

    Chronique du racisme ordinaire

    Ma voisine est le genre de personne qui en toute occasion prend soin d'elle. Toujours tirée à quatre épingles, sobrement maquillée, une jolie broche au revers de la veste, que ce soit pour aller acheter une botte de poireaux ou se rendre à la banque, son statut de veuve de colonel lui impose de tenir son rang, celui de la France d'en haut qui élève ses enfants avec une autorité placée sous l'étendard des bonnes manières, de la bienséance et des valeurs chrétiennes dont elle s'imbibe tous les dimanche en mangeant son dieu incarné dans un bout de pain, recueilli avec ferveur des mains du prêtre.

    Notre première rencontre eut lieu voici quatre ans dans l'ascenseur alors que j'emménageais dans mon nouveau chez-moi. Elle était en compagnie de son hypocondriaque de fille, frêle et chétive créature, écrasée par trente ans de suffocantes attentions maternelles.
    - "Ho, me dit-elle, c'est très bien que vous emménagiez dans cet appartement. Ca va nous faire du bien. Parce que vous savez, après toutes les horreurs qu'on a subies, on n'en pouvait plus ! Mais on veut pas vous faire peur hein... "
    Non du tout... J'avoue néanmoins qu'il n'en fallait pas moins pour piquer mon insatiable curiosité au vif.
    - Ha bon ? Mais il s'est passé quoi dans cet appartement ? m'enquerrais-je aussitôt.
    - Ho, c'était une israëlite mariée à un arabe ; ils se disputaient toutes les semaines, on les entendait dans tout l'immeuble. J'avais peur vous savez monsieur ! Même la police est venue plusieurs fois. Mais vous savez, ces gens là... C'est dans leur nature !"
    Sur le moment je n'ai pas trop réagi. Je me disais seulement que cet appartement allait être chargé d'ondes négatives et que, si les fautifs étaient partis, l'immeuble allait être désormais tout à fait calme.

    Par la suite j'étais amené à recroiser régulièrement ma voisine, dans la rue ou le hall d'entrée, toujours suivie de sa transparente progéniture, et échangions à l'occasion quelques mots courtois. Sauf que revenaient toujours dans sa bouche quelques giclées de venin tantôt contre le petit marocain de l'immeuble d'en face :
    - Hoooooo, mais c'est qu'il ne fait rien de la journée !!  Toujours après sa moto... vous croyez que c'est normal ça monsieur ?
    tantôt contre une black passant devant nous avec ses trois enfants en train de brailler :
    - Et celle là, vous croyez qu'elle avait besoin d'avoir tous ces gosses ? Non mais regardez moi ça !!
    Je ne sais pas pourquoi la réalité ne m'avait pas plus tôt éclaté au visage.
    Hier soir ce fut le pompon.

    J'avais reçu une étrange invitation à venir prendre une coupe de champagne sur le coup de neuf heures du soir. Pris de court par cette proposition surprenante, j'avais bêtement accepté. J'espérais seulement que ce ne fut pas une sorte de rendez-vous galant déguisé dont l'objet serait de faire plus ample connaissance avec sa laideronne de fille.

    Sachant le peu de cas qu'elle porte aux non-français, j'ai du mal à imaginer qu'elle serait sa réaction si je venais à lui  révéler  tout de go ma "singularité" afin de repousser des avances malvenues, faisant fi des convenances :
    - Madame, je suis pédé... je suce des bites moi, pas des foufounes...
    Je pense qu'elle en mourrait sur place ou qu'elle se disloquerait atome par atome...

    Etant un garçon bien élevé j'avais pour l'occasion acheté un petit bouquet de fleurs histoire de ne pas arriver les mains vides. Une petite appréhension tout de même : une rose rouge se perd au milieu du bouquet, pourvu qu'elle n'interprète pas cette coquetterie du fleuriste pour un message subliminal de ma part !

    La providence avait suggéré à mon hôtesse d'inviter l'une de ses bonnes amies - que nous appellerons Nicole - afin de ne point me laisser seul. Qu'elle (la providence) trouve ici l'expression de toute ma gratitude !

    Après avoir papoté chiffons pendant un bon petit moment et bu quelques coupes de champagne au milieu du petit salon cossu, Nicole commence à vider son sac et à nous raconter les déboires amoureux de son fiston, que j'imagine être le paroxysme de ce que peut être une bonne poire mollassonne et apathique. Je ne sais pas ce qui de l'histoire de Nicole ou des commentaires qu'en fit ma voisine m'a le plus horrifié. 

    Si le récit de Nicole  fut celui d'un véritable calvaire familial, mêlant déchirements familiaux et violences conjugales avivées par un divorce raté, les apartés de ma voisine furent la chronique d'un racisme ordinaire dont je me résous à ne relater ici qu'un court medley. Toute la puanteur du FN mêlée aux relents populistes du journal télévisé de Jean Pierre Pernaut...  
    - Ho les arabes vous savez... Ho et les noirs c'est pas mieux... Quand je vois tous ces gosses tenus n'importe comment, moi j'ai envie de... couic ! (elle mime de les étrangler) C'est au bazooka que j'irai moi ! Ho mais on n'est plus en sécurité vous savez ! Mais je les ai déjà dénoncé à la police les malgaches du 6° !
    Souvent je me suis demandé quel était le profil des électeurs d'extrême droite. 

    Maintenant je sais. 

    C'est couillon... j'l'aimais bien la voisine du 4°. Mais quelque chose me dit que rien ne sera plus pareil.

    11 commentairess:

    1. "Les rues de Paris ne sont plus sûres.
      Dans certains quartiers chauds de la capitale, les arabes n'osent plus sortir tout seuls le soir."

      Paroles de P. D.

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    2. En lisant ton histoire on hésite entre tristesse et colère. Mais après la chute!!!!Dans une toute petite ville où j'ai travaillé en 2002, il y avait un homme à qui personne ne disait bonjour, car il avait dénoncé à tour de bras pendant la guerre. Et il faut vivre avec ça...

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    3. Eh ben !!
      Tu as gardé ton calme toi... moi j'aurai pas pu.

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    4. @ Flavien : Je ne suis pas certain de saisir le sens de la permière partie de ton commentaire... Ma pauvre voisine aurait pu être cet homme dont tu parles ; elle en a tout le potentiel.

      @ Fred : J'ai gardé mon calme pour des raisons bassement triviales. Je me suis plusieurs fois demandé si j'allais sortir en claquant la porte. Mais...
      Mais j'avais un terrible envie de pisser (un truc de malade) difficilement contenue. M'énerver m'aurait inévitablement conduit à une situation dramatique...

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    5. G emménagé il y a un an dans un charmant petit appartement au fond d'une cour, charmante aussi. Et sur l'immeuble qui donne sur la rue, beaucoup de personnes de couleurs. Le monsieur qui tient le bar restaurant, au rdc, un vieux monsieur qui me semblait sympathique, m'a tenu un jour que je coupais les rosiers dans la cour un discours malvenu :

      "oh vous savez, je suis la depuis 30 ans, je connais bien le quartier, et l'immeuble, n'en parlons pas. Tout allait bien, si vous voulez mon avis, avant que les bougnouls arrivent au 4è et les indiens juste en dessous. De la mauvaise graine".

      Et là, j'ai vu la ressemblance frappante (véridique) avec un certain Jean-Marie. Vous pensez qu'il y a un gène ? Un faciès? de connard homophobe raciste (oui, parce que les pd il supporte devant moi, mais il aime pas particulièrement quand même)

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    6. En même temps ce qui est rassurant c'est de constater que ces gens peuvent vider tout leur venin sans jamais être contredits...

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    7. Haine de l'autre, haine de soi, même combat.
      Combattons les raçines de la haine.
      Education !

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    8. Les premières paroles de mon ex voisin du dessous, le jour de mon emménagement : "vous venez d'où ? Ah oui je connais, y a plein d'arabes là-bas aussi. Parce que vous verrez, ici ils sont partout".

      Le ton était donné...

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    9. @ Fabisounours : Un proche parent à ma voisine du 4° peut être ?

      @ Patrick Antoine : Cruellement vrai... Je ne sais jamais trop comment réagir face à ces gens. Souvent le dialogue est impossible, les oeillères trop épaisses, les charentaises trop ensablées. Leur haine est inversement proportionnel à leur ouverture d'esprit. Rude !

      @ Elliot : Education. C'est un long combat. Un lourd travail de fond.

      @ Chickenbaby : Apparemment, il n'y a pas qu'eux qui soient partout...

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    10. Fallait pisser dans une plante verte ;-D
      Elle a bien ça ta voisine ?

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    11. Vaste sujet ... J'ai souvent remarqué que les gens les plus racistes sont surtout ceux qui côtoient le moins les immigrés ...
      C'est triste pour elle : elle accumule de la haine et de la rancœur au lieu de vivre !

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