Ce qu'il y a de terrible lorsque je me rends au marché Victor Hugo à Toulouse, c'est cette envie irrépressible de vouloir tout acheter, alors même que l'on n'y est venu que sous le prétexte de "faire un tour" et acheter "juste trois tomates".
Grave erreur...
C'est un peu comme aller chez l'ami Suédois sans se douter que l'on en ressortira invariablement avec au minimum des bougies, quand ce n'est pas une nouvelle bibliothèque dont on ignorait que l'on en avait un besoin impérieux jusqu'au moment précis où on l'a vue en rayons. Ça ne loupe jamais.
Grave erreur...
C'est un peu comme aller chez l'ami Suédois sans se douter que l'on en ressortira invariablement avec au minimum des bougies, quand ce n'est pas une nouvelle bibliothèque dont on ignorait que l'on en avait un besoin impérieux jusqu'au moment précis où on l'a vue en rayons. Ça ne loupe jamais.
Ce matin donc, je me rendais au marché Victor Hugo à la quête de quelques végétaux de saison qui pourraient venir égayer ma tranche de beef bien rouge prévue pour le midi, achetée la veille chez mon boucher. A priori quelques cèpes, pourquoi pas, si le prix en était raisonnable.
Je m'approche donc de ce temple Toulousain de l'hédonisme à la quête de mes basidiomycètes. Ici des piments doux, un peu hors saison mais tellement bons grillés au four avec un filet d'huile ; là des potimarrons, excellents en purée avec une noisette de beurre, ou en gâteau sucré mais ils demandent un bon investissement de temps que je n'avais pas ; là-haut des panais, délicieux mais ce n'est pas exactement ce dont j'ai envie...
Nous y voilà : des cèpes. Les malheureux ont hélas une bien triste mine et je devine à leur allure que je ne suis pas le seul à les convoiter, d'autres s'étant vraisemblablement déjà immiscés à l'intérieur... Saperlipopette ! J'étais frustration.
Et puis, au détour d'une cagette de carottes, voici des pleurotes qui me font soudain de l’œil. De belle allure, la cuisse ferme et le teint laiteux tout ce qu'il faut. Hop, aussitôt vus aussitôt adoptés, je m'en prends de quoi remplir mon estomac pour la somme faramineuse de 2,50 Euros. Oui, l'avantage du pleurote sur le cèpe est, outre qu'il est souvent vierge de résidents indésirables, que son prix est imbattable.
L'erreur fut de ne pas rebrousser immédiatement chemin et de m'engouffrer plus avant dans les entrailles de ce ventre de Toulouse.
Quelques pas plus loin, après avoir contourné les étals des poissons et réalisé au passage un petit portrait de famille (et constaté que ma poissonnière adorée n'y était plus), me voici nez à nez avec l'une de mes innombrables Némésis : un fromager.
Inspectant la vitrine, juste pour me faire saliver, je découvre au détour d'une montagne de Maroilles, un saladier rempli à raz bord de crème fraîche d'Isigny. Diantre ! L'un de mes amis - qui mangerait de la crème fraîche sur la tête d'un chien galeux - m'en avait naguère vanté les louanges en des termes dithyrambiques. La tentation était bien trop forte pour ne pas y succomber. Je ne ferai donc pas durer plus longtemps le suspens vu qu'il n'y en a aucun : j'en ai acheté 500g.
Rentré à la maison, les papilles en alerte, j'extirpais le pot transparent de son sachet en papier brun, m'emparais une petite cuillère que j'enfonçais dans la masse nacrée puis que j'extrayais ensuite la bave aux lèvres, tandis que le dos de la cuillère se décollant du pot formait spontanément de jolis becs dans cette crème d'une onctuosité démoniaque. Un morceau de pain frais déchiré à la main, et là ce fut le drame...
Putain de sa race : ce que c'est bon la crème fraîche d'Isigny !
C'est alors que jaillit dans mon esprit une idée scandaleuse par une association d'idées des plus géniale : des pleurotes frais, de la crème, j'avais des bonnes pâtes dans mes placards : arrivedeci la pièce de bœuf, voici mon menu de midi ! Des pâtes aux pleurotes et à la crème.
Vu le succès que ma photo a remporté sur twitter et les réactions nombreuses des gourmands qui hantent mes contacts, pour toi public, voici ma recette (inventée sur le moment).
Pâtes aux pleurotes et à la crème
Alla Tambour Major
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Prix : Pas cher. Temps : 10-15 minutes. Difficulté : Aucune. Indice de plaisir : 17/20
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Je ne donne pas la liste des ingrédients, tout est dans le titre. Et puis tu sauras le menu détail en lisant la recette. Pas de proportions non plus. La bonne bouffe c'est souvent au pifomètre...
1/ Dans une grande casserole, tu fais cuire tes pâtes. Des bonnes pâtes. Pas du 1er prix, tu vas les manger après. Alors pense à te faire plaisir. De Cecco est un minimum. Avec des pâtes fraîches (à la semoule hein, pas à la farine) tu approches de l'Olympe...
Tu ne sales pas l'eau, ça ne sert à rien. L'assaisonnement, c'est la sauce qui va le faire pour toi.
Pour le temps de cuisson tu enlèves 1 à 2 minutes au temps indiqué sur l'emballage. Question de vie ou de mort. Capisci ?
2/ Pendant ce temps, tu fais cuire tes champignons à feu bien vif dans un peu d'huile d'olive ou un peu de gras de canard (ici on est dans le Sud-Ouest), jusqu'à légère coloration. Ne remue pas trop ni trop souvent, tu vas les esquinter. Et ne couvre pas. Sous aucun prétexte. Tu les entends chanter tes pleurotes ? Non ? Allez, approche l'oreille et ferme les yeux...
3/ Au bout de deux ou trois couplets, quand tes pleurotes ont une belle mine et les cuisses dorées, tu les déglaces avec deux ou trois cuillères à soupe de porto rouge ou un vin similaire. Moi j'ai fait avec du floc de Gascogne rouge, pour rester couleur locale. Là c'est le chœur final. On croirait le Te Deum de Tosca. Tes pleurotes ils montent au paradis des pleurotes.
4/ A ce moment là seulement, et pas avant, tu sales, tu poivres bien (avec du poivre noir, frais, du moulin !) et tu rappes une petite pincée de muscade. Haha ! Oui Monsieur !
5/ Surveilles rapidement tes pâtes, okazou.
6/ Reviens à tes champignons Tu ajoutes ta crème fraîche, environ 2 bonnes grosses cuillères à soupe bien pleines. Il faut que tes pleurotes puisse se vautrer dedans et s'en mettre plein la lampe. Si tu as de la crème liquide, compte une petite brique. Hé oué mon gars, faut ce qu'il faut ! Ensuite tu baisses le feu et tu laisses mijoter 3 minutes sans couvrir.
7/ Normalement tes pâtes sont cuites maintenant. Alors tu les égouttes, puis tu les ajoutes, directement dans ta poêle, aux champignons qui sont en train de prendre leur pied dans la sauce. Et maintenant tu couvres. Tu laisses imprégner 5 minutes à tout petit feu et en remuant légèrement, avec délicatesse, bordel. On prépare du bonheur ici.
Attention petit scarabée, j'ai dit 5 minutes. Pas 10 ni 15... On ne badine pas avec le temps.
8/ Avant de servir ce morceau de paradis dans une belle assiette, tu goûtes (si ! tu goûtes !) et tu rectifies l'assaisonnement si c'est nécessaire (et ce sera nécessaire) en sel et en poivre. Faut bien poivrer, surtout. Le poivre et le sel, c'est la vie en cuisine. Sinon c'est pas la peine...
9/ La préparation de ce miracle culinaire t'a pris 15 minutes à tout casser. Alors maintenant assieds-toi, savoure, et profite... Et n'oublie pas de déboucher une bonne bouteille surtout. Du rouge, épicé et charpenté. C'est pas de la rigolade que t'as dans ta gamelle. Alors rends-lui la pareille...
Je connais le secret de la pleurote depuis longtemps
RépondreSupprimerPeu cher et un délice
J'ai déjà salivé en voyant la photo chez l'oiseau bleu mais ce billet me donne une sacrée envie... C'est indécent Monsieur Tambour Major!!!!
RépondreSupprimerJ'approuve mais j'aurais bouffé le bœuf en même temps. Bien saignant (normal quoi), un peu froid pour faire du contraste avec le reste. Le bonheur.
RépondreSupprimerJe viens d'avoir un lecturegasme
RépondreSupprimerCela donne furieusement d'aller voir sur le marché si quelques pleurotes ne trainent pas par là. et comme dit si bien Nekkonezumi quel bel lecturegasme.
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