"Car l'enthousiasme est chez les jeunes gens comme une maladie infectieuse. Dans une classe, il se transmet de l'un à l'autre à l'instar de la rougeole ou de la scarlatine, et comme les néophytes, avec leur orgueil ostentatoire et enfant, cherchent à surpasser le plus rapidement possible les autres par leur savoir, chacun pousse autrui de l'avant. C'est pourquoi, en fait, la direction particulière que prend leur passion n'est plus ou moins qu'un effet de hasard : s'il se trouve dans une classe un collectionneur de timbres-poste, il y aura bientôt une douzaine de fous pour l'imiter, si trois d'entre eux sont épris des danseuses, tous les autres irons se camper jour après jour devant l'entrée des artistes de l'Opéra. Trois ans après la nôtre, il y eut une classe enragée de football ; une de celles qui nous avaient précédés s'enthousiasmait pour le socialisme de Tolstoï. Le fait que je me trouvais parmi des camarades fanatiques des beaux-arts a peut-être déterminé l'orientation de toute ma vie"
Stefan Sweig, Le Monde d'hier, Souvenirs d'un Européen (1941)
Ed. belfond, pp. 59-60.
"Le monde d'hier..." est l'un des plus beaux livres du monde. Il est pour moi presque vital de savoir que je peux l'extraire de la bibliothèque et le lire une fois de plus.
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