Finir l'année autour d'une opérette, fraîche et pétillante, mais quelle formidable idée ? Il est donc naturel qu'elle ait traversé mon esprit exceptionnellement brillant.
Mercredi 30 nous avions donc rendez-vous au TNT pour assister à La Vie Parisienne de l'ami Jacques Offenbach qui, par un hasard cocasse, était diffusée quelque jours auparavant en fin de soirée à la télévision. Mais désireux de conserver intact le plaisir de la découverte, j'avais soigneusement boudé cette production pourtant alléchante.
Le propos de cet opéra bouffe est assez simple : deux gredins, Gardefeu et Bobinet convoitent la même femme. Dans une gare où ils attendent, Gardefeu se fait passer pour un guide auprès du baron de Gondremarck et Madame à qui il promet de faire visiter tout Paris et de les introduire dans le grand monde. Ce n'est là que le début de leurs soucis (pour l'argument dans son intégralité allez voir par ici).
Lors de la réservation des places, je n'avais pas lésiné sur le prix, allons y franco, de sorte que nous nous sommes retrouvé très proche de la scène et pile poil au centre. Malgré un instant de doute, j'aime bien me trouver un peu en hauteur de sorte à dominer l'espace scénique, il s'avéra rapidement que cet emplacement fut stratégiquement parfait. En effet, des travaux importants obligent l'opéra à tenir portes closes pour la saison en cours, cette saison doit par conséquent se tenir hors les murs. Les Dialogues des Carmélites avaient déjà, dans un autre lieu, un peu souffert d'un espace à l'acoustique mal appropriée aux voix d'opéra. La salle du TNT qui nous accueillait ce soir là ne s'est montré guère plus convaincante. Les contraintes du théâtre ne sont pas celles de l'opéra et le conduit d'une voix qui chante n'a pas les mêmes besoins que celui d'un acteur qui déclame. Notre position avantageuse nous a toutefois permis de suivre les 4 actes sans trop de mal, même si certains choeurs d'arrière scène demandaient à ce que l'on tende un peu plus l'oreille. Je ne pense pas que les spectateurs situés tout en haut de la salle aient pu profiter tout autant du spectacle, du moins pour les séquences chantées. L'orchestre, peu à son aise dans une fosse bien étroite, a certainement pâtit de ces mé-dispositions, avait à sa tête un jeune chef - Alfonso Caiani - à la bouille sympathique dont la direction vive et franche - et physiquement engagée jusqu'à la dernière seconde - ne souffre presque aucune critique de mon point de vue. Malgré quelque décalages très vite rattrapés, et le manque évident de réverbération, la petite troupe a mené son affaire tambourmajor battant, préservant l'équilibre voix/orchestre si fragile jusque dans les passages pianissimo.
Malgré cette inadéquation du lieu sur ce point - ce qui témoigne hélas des énormes lacunes de la Ville Rose dans ce domaine - la soirée fut toutefois magnifique.
Si elle n'a pas les proportions de la scène d'opéra, celle du TNT fut astucieusement exploitée. Quoique l'action se déroule dans le dernier tiers du XIX° siècle, le parti fut pris d'un modernisation parcimonieuse mais efficace tant sur du discours que des décors.
Hormis l'acte deuxième qui fait montre de plus de parcimonie, les décors sont abondants, très riches, colorés, multipliant les arrières-plans permettant une profondeur de scène impressionnante dont chaque recoin ou presque est utilisé. Point d'économie de moyens, place à l'artillerie lourde pour la fin de l'année ! Un décors par acte, fortement référencé dans le Paris contemporain, ne réutilisant chaque fois que peu d'éléments du précédent, à l'exception du fond de scène mais qui fut néanmoins astucieusement remaquillé au fil de la soirée, donnant l'illusion d'un renouveau permanent. Voitures sur scènes, cadres géants, table de douze mètres, escalator, la démesure des décors - souvent interactifs - se veut à l'image de la démesure de la vie parisienne rêvée par les touristes dont on se joue. Et cela fait un sacré bien.
La mise en scène ne fait pas non-plus dans la demi mesure (pas plus que la musique d'ailleurs), ne cachant pas les ambitions des personnages : c'est bien de gaudriole et de parties de jambes en l'air qu'il s'agit. Point de chichitage : Bobinet (le très mignon Marc Callahan, surtout en petite tenue...) et son comparse Gardefeu ont le sang très chaud et la sève haute... les enjeux sont clairs, et le jeu sur scène ne laisse aucun doute à ce sujet, faisant litière de la bienséance puritaine qui pourrait enrober le froufrou des dames de la haute société et de la position à laquelle doivent se conformer les hommes du monde. Mis à part la trivialité du propos frisant parfois l'obscène - nous eûmes droit à de nombreux coups de rein sans équivoque ainsi qu'à une éjaculation de Veuve Cliquot - la bonne humeur était au rendez-vous et, quoique les acteurs ne furent pas "à fond" tout le temps (sauf à se repoudrer le nez entre deux actes) une belle énergie se dégageait de l'ensemble, les uns et les autres prenant un plaisir évident à jouer cette bouffonnerie trépidante. Dès le premier acte (à la gare) ça court dans tous les sens, ça crie, ça tressaute, ça manifeste à grands coups de banderoles remises au goût du jour, le poing levé. On s'y croirait ! Le détail a même été poussé jusqu'à introduire une hôtesse chargée de faire des annonces régulières d'arrivées et de retards de trains au micro, ponctuées par le jingle SNCF. On est là pour s'amuser, allons y à fond sans craindre la surenchère, tel semble avoir été le maître mot de la mise en scène que j'ai trouvée tout à fait réussie. J'attribue une mention toute particulière aux deux interludes placés au premier puis second tiers, et censés représenter la rue parisienne au petit matin. Rabaissée à une hauteur d'environ 3 mètres par le tomber du rideau et éclairée par des ampoules électriques clignotant par alternance, la scène se trouve réduite à la largeur d'un couloir. Des gens vont et viennent, éboueurs, princesses et autres diablotins de la nuit, le diable au corps, se livrent à des frasques totalement délirantes et purement jubilatoires. Clou du spectacle lorsque, une fois le rideau tombé, toute la troupe réunie sur scène - chef inclus - se lance dans un dernière chorégraphie au son de l'orchestre endiablé. Un vrai bonheur !
Il n'en fallait pas moins pour donner à cette Vie Parisienne tout son panache. Car il en va de la musique de Offenbach comme d'un gros hamburger avec ses frites : d'allure massive, passablement décadent, c'est joli, ça sent bon, ça rassasie sur le moment, mais on a vite à nouveau faim.... Après tout, il n'y a pas de mal à se faire du bien de temps en temps et se faire du bien au moral.
Mercredi 30 nous avions donc rendez-vous au TNT pour assister à La Vie Parisienne de l'ami Jacques Offenbach qui, par un hasard cocasse, était diffusée quelque jours auparavant en fin de soirée à la télévision. Mais désireux de conserver intact le plaisir de la découverte, j'avais soigneusement boudé cette production pourtant alléchante.
Le propos de cet opéra bouffe est assez simple : deux gredins, Gardefeu et Bobinet convoitent la même femme. Dans une gare où ils attendent, Gardefeu se fait passer pour un guide auprès du baron de Gondremarck et Madame à qui il promet de faire visiter tout Paris et de les introduire dans le grand monde. Ce n'est là que le début de leurs soucis (pour l'argument dans son intégralité allez voir par ici).
Lors de la réservation des places, je n'avais pas lésiné sur le prix, allons y franco, de sorte que nous nous sommes retrouvé très proche de la scène et pile poil au centre. Malgré un instant de doute, j'aime bien me trouver un peu en hauteur de sorte à dominer l'espace scénique, il s'avéra rapidement que cet emplacement fut stratégiquement parfait. En effet, des travaux importants obligent l'opéra à tenir portes closes pour la saison en cours, cette saison doit par conséquent se tenir hors les murs. Les Dialogues des Carmélites avaient déjà, dans un autre lieu, un peu souffert d'un espace à l'acoustique mal appropriée aux voix d'opéra. La salle du TNT qui nous accueillait ce soir là ne s'est montré guère plus convaincante. Les contraintes du théâtre ne sont pas celles de l'opéra et le conduit d'une voix qui chante n'a pas les mêmes besoins que celui d'un acteur qui déclame. Notre position avantageuse nous a toutefois permis de suivre les 4 actes sans trop de mal, même si certains choeurs d'arrière scène demandaient à ce que l'on tende un peu plus l'oreille. Je ne pense pas que les spectateurs situés tout en haut de la salle aient pu profiter tout autant du spectacle, du moins pour les séquences chantées. L'orchestre, peu à son aise dans une fosse bien étroite, a certainement pâtit de ces mé-dispositions, avait à sa tête un jeune chef - Alfonso Caiani - à la bouille sympathique dont la direction vive et franche - et physiquement engagée jusqu'à la dernière seconde - ne souffre presque aucune critique de mon point de vue. Malgré quelque décalages très vite rattrapés, et le manque évident de réverbération, la petite troupe a mené son affaire tambour
Malgré cette inadéquation du lieu sur ce point - ce qui témoigne hélas des énormes lacunes de la Ville Rose dans ce domaine - la soirée fut toutefois magnifique.
Si elle n'a pas les proportions de la scène d'opéra, celle du TNT fut astucieusement exploitée. Quoique l'action se déroule dans le dernier tiers du XIX° siècle, le parti fut pris d'un modernisation parcimonieuse mais efficace tant sur du discours que des décors.
Hormis l'acte deuxième qui fait montre de plus de parcimonie, les décors sont abondants, très riches, colorés, multipliant les arrières-plans permettant une profondeur de scène impressionnante dont chaque recoin ou presque est utilisé. Point d'économie de moyens, place à l'artillerie lourde pour la fin de l'année ! Un décors par acte, fortement référencé dans le Paris contemporain, ne réutilisant chaque fois que peu d'éléments du précédent, à l'exception du fond de scène mais qui fut néanmoins astucieusement remaquillé au fil de la soirée, donnant l'illusion d'un renouveau permanent. Voitures sur scènes, cadres géants, table de douze mètres, escalator, la démesure des décors - souvent interactifs - se veut à l'image de la démesure de la vie parisienne rêvée par les touristes dont on se joue. Et cela fait un sacré bien.
La mise en scène ne fait pas non-plus dans la demi mesure (pas plus que la musique d'ailleurs), ne cachant pas les ambitions des personnages : c'est bien de gaudriole et de parties de jambes en l'air qu'il s'agit. Point de chichitage : Bobinet (le très mignon Marc Callahan, surtout en petite tenue...) et son comparse Gardefeu ont le sang très chaud et la sève haute... les enjeux sont clairs, et le jeu sur scène ne laisse aucun doute à ce sujet, faisant litière de la bienséance puritaine qui pourrait enrober le froufrou des dames de la haute société et de la position à laquelle doivent se conformer les hommes du monde. Mis à part la trivialité du propos frisant parfois l'obscène - nous eûmes droit à de nombreux coups de rein sans équivoque ainsi qu'à une éjaculation de Veuve Cliquot - la bonne humeur était au rendez-vous et, quoique les acteurs ne furent pas "à fond" tout le temps (sauf à se repoudrer le nez entre deux actes) une belle énergie se dégageait de l'ensemble, les uns et les autres prenant un plaisir évident à jouer cette bouffonnerie trépidante. Dès le premier acte (à la gare) ça court dans tous les sens, ça crie, ça tressaute, ça manifeste à grands coups de banderoles remises au goût du jour, le poing levé. On s'y croirait ! Le détail a même été poussé jusqu'à introduire une hôtesse chargée de faire des annonces régulières d'arrivées et de retards de trains au micro, ponctuées par le jingle SNCF. On est là pour s'amuser, allons y à fond sans craindre la surenchère, tel semble avoir été le maître mot de la mise en scène que j'ai trouvée tout à fait réussie. J'attribue une mention toute particulière aux deux interludes placés au premier puis second tiers, et censés représenter la rue parisienne au petit matin. Rabaissée à une hauteur d'environ 3 mètres par le tomber du rideau et éclairée par des ampoules électriques clignotant par alternance, la scène se trouve réduite à la largeur d'un couloir. Des gens vont et viennent, éboueurs, princesses et autres diablotins de la nuit, le diable au corps, se livrent à des frasques totalement délirantes et purement jubilatoires. Clou du spectacle lorsque, une fois le rideau tombé, toute la troupe réunie sur scène - chef inclus - se lance dans un dernière chorégraphie au son de l'orchestre endiablé. Un vrai bonheur !
Il n'en fallait pas moins pour donner à cette Vie Parisienne tout son panache. Car il en va de la musique de Offenbach comme d'un gros hamburger avec ses frites : d'allure massive, passablement décadent, c'est joli, ça sent bon, ça rassasie sur le moment, mais on a vite à nouveau faim.... Après tout, il n'y a pas de mal à se faire du bien de temps en temps et se faire du bien au moral.
Et grâce au deuxième interlude de cette délirante mise en scène, on peut désormais affirmer qu'une danseuse en robe de soirée noire tient dans une poubelle parisienne sans problème.
RépondreSupprimerQui l'eût cru ?
Extrait de la même mise en scène :
RépondreSupprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=dbjNQN4iYLk