Walt Kowalski a fait le Vietnam où il a goûté à la saveur douçâtre de la mort. Il habite une maison dans un quartier résidentiel peu à peu investi par les "faces de citron" comme il les appelle. Walt déteste les niakoués et tout ce qui n'est pas Américain en général. Il n'apprécie pas son fils, commercial pour une firme automobile Japonaise, et c'est d'un regard dédaigneux qu'il l'observe reprendre la route au soir de l'enterrement de son épouse. En voiture Japonaise, son fils ! Alors que lui a fait la guerre aux jaunes avant de bosser comme un dingue pour Ford le reste de sa vie...
Quelle ne sera pas sa rage lorsque, le même jour le petit Thao viendra frapper à la porte pour demander des câbles électriques... De son grognement d'ours aigri, Walt congédiera "tête de nem" sans ménagement, avant de retourner morigéner parmi sa famille abhorrée. Car Walt n'aime personne si ce n'est son vieux chien à moitié sourd, son M-1 toujours prêt à servir, et son vieux pote Italien le coiffeur, avec qui il aime plaisanter en s'envoyant les pires saloperies du monde en pleine figure en guise de formule de politesse.
La vie de Walt aurait ainsi suivre son cours, de grognements haineux en regards noirs à la vieille folle qui l'insulte dans un dialecte Hmong depuis son perron, échanges de courtoisie ponctués de quelques bières, le Stars and Stripes toujours en étendard au seuil de la porte, si, poussé par son cousin, Thao n'avait tenté de lui voler la belle Ford Gran Torino précieusement conservée dans le garage. Pris sur la main dans le sac, Thao parvient à s'enfuir mais échoue du même coup à l'initiation à laquelle il était pourtant sommé de réussir afin de devenir, comme son grand cousin, un homme, un vrai, un qui se bat avec des armes et rode en grosse bagnole, un de ceux que l'on craint et que l'on respecte. Un du gang. Cet incident qui aurait pu être funeste va pourtant être le point de départ d'une vraie rencontre entre le vieux rustre et le vaurien raté.
Car Thao n'est pas un sauvageon. Derrière ses airs de poupon timide qui n'ose pas parler aux filles se cache un ado intelligent et débrouillard qui refuse la facilité de la délinquance, ce dont son grand cousin et sa clique de gangsters mal lunés lui tiendra d'ailleurs une féroce rigueur.
Un américain nationaliste, raciste, bourré de préjugés, replié sur lui même, installé dans un quartier accaparé par l'envahisseur jaune, dont les alentours sont aux mains des gangs blacks, latinos et asiatiques, sans compter ce foutu cureton qui tient absolument à lui extorquer une confession, c'est à peu près ainsi que commence Gran Torino, le dernier film de Clint Eastwood où je me suis docilement laissé traîner hier soir. Nous est dépeinte une Amérique cosmopolite, le fameux "melting pot" dans lequel la mayonnaise ne prend pas : les gens se supportent, se côtoient, sans se mélanger, chacun chez soi. Les quartiers sont ghettoïsés, il ne fait pas bon sortir du territoire dans lequel chaque ethnie se trouve circonscrite de fait. C'est aussi une Amérique des armes ceinturée par le deuxième amendement de la Constitution, une Amérique où la violence est chose banale, la seule façon d'exister aux yeux de certains, la seule façon d'assurer sa propre sécurité pour d'autres. Vision pessimiste s'il en est ! On n'échappe pas à certains clichés, notamment celui du tailleur juif, mais cela reste très anecdotique et n'altère en rien la superbe réalisation dont bénéficie le dernier opus de papi Eastwood.
Pourtant au milieu de tout ce marasme, une ligne d'espoir se dessine : il semble possible de s'entendre, à condition d'ouvrir ses oreilles, d'ouvrir son coeur et de passer outre ses préjugés. C'est le défi auquel Walt sera bientôt confronté quoiqu'il n'en ait pas la moindre envie, engoncés dans ses réflexes d'ancien soldat du Vietnam.
Contrairement aux apparences, Gran Torino n'est pas - et il s'en faut de beaucoup - un film austère, lourd et pesant de bout en bout comme avait pu l'être Mystic River sorti en 2003. Bien au contraire, ce film est vraiment drôle. Non pas en raison d'un bouffon comique de situation, on n'est pas dans du Defunès, mais par ses dialogues absolument savoureux qui font mouche à tous les coups. On dirait presque du Audiard et l'on rit vraiment souvent, parfois à gorge déployée, sans aucune concession à la facilité. Clint Eastwood parvient à faire du personnage de Walt Kowalski un personnage totalement rugueux tant du point de vue psychologique que physique, bougon à l'extrême, à la limite de la caricature, sans pourtant tomber dans le piège d'une indigeste parodie burlesque, et dont chaque réplique est gorgée d'une dose d'humour savamment distillée, révélant peu à peu un homme au grand coeur derrière le masque du vétéran acrimonieux. Peut être ne faut-il y voir que la politesse du désespoir ou la force tranquille de ceux que plus rien n'impressionne, désabusés par la condition humaine. Du grand art pour un magnifique acteur, à voir absolument !
La vie de Walt aurait ainsi suivre son cours, de grognements haineux en regards noirs à la vieille folle qui l'insulte dans un dialecte Hmong depuis son perron, échanges de courtoisie ponctués de quelques bières, le Stars and Stripes toujours en étendard au seuil de la porte, si, poussé par son cousin, Thao n'avait tenté de lui voler la belle Ford Gran Torino précieusement conservée dans le garage. Pris sur la main dans le sac, Thao parvient à s'enfuir mais échoue du même coup à l'initiation à laquelle il était pourtant sommé de réussir afin de devenir, comme son grand cousin, un homme, un vrai, un qui se bat avec des armes et rode en grosse bagnole, un de ceux que l'on craint et que l'on respecte. Un du gang. Cet incident qui aurait pu être funeste va pourtant être le point de départ d'une vraie rencontre entre le vieux rustre et le vaurien raté.
Car Thao n'est pas un sauvageon. Derrière ses airs de poupon timide qui n'ose pas parler aux filles se cache un ado intelligent et débrouillard qui refuse la facilité de la délinquance, ce dont son grand cousin et sa clique de gangsters mal lunés lui tiendra d'ailleurs une féroce rigueur.
Un américain nationaliste, raciste, bourré de préjugés, replié sur lui même, installé dans un quartier accaparé par l'envahisseur jaune, dont les alentours sont aux mains des gangs blacks, latinos et asiatiques, sans compter ce foutu cureton qui tient absolument à lui extorquer une confession, c'est à peu près ainsi que commence Gran Torino, le dernier film de Clint Eastwood où je me suis docilement laissé traîner hier soir. Nous est dépeinte une Amérique cosmopolite, le fameux "melting pot" dans lequel la mayonnaise ne prend pas : les gens se supportent, se côtoient, sans se mélanger, chacun chez soi. Les quartiers sont ghettoïsés, il ne fait pas bon sortir du territoire dans lequel chaque ethnie se trouve circonscrite de fait. C'est aussi une Amérique des armes ceinturée par le deuxième amendement de la Constitution, une Amérique où la violence est chose banale, la seule façon d'exister aux yeux de certains, la seule façon d'assurer sa propre sécurité pour d'autres. Vision pessimiste s'il en est ! On n'échappe pas à certains clichés, notamment celui du tailleur juif, mais cela reste très anecdotique et n'altère en rien la superbe réalisation dont bénéficie le dernier opus de papi Eastwood.
Pourtant au milieu de tout ce marasme, une ligne d'espoir se dessine : il semble possible de s'entendre, à condition d'ouvrir ses oreilles, d'ouvrir son coeur et de passer outre ses préjugés. C'est le défi auquel Walt sera bientôt confronté quoiqu'il n'en ait pas la moindre envie, engoncés dans ses réflexes d'ancien soldat du Vietnam.
Contrairement aux apparences, Gran Torino n'est pas - et il s'en faut de beaucoup - un film austère, lourd et pesant de bout en bout comme avait pu l'être Mystic River sorti en 2003. Bien au contraire, ce film est vraiment drôle. Non pas en raison d'un bouffon comique de situation, on n'est pas dans du Defunès, mais par ses dialogues absolument savoureux qui font mouche à tous les coups. On dirait presque du Audiard et l'on rit vraiment souvent, parfois à gorge déployée, sans aucune concession à la facilité. Clint Eastwood parvient à faire du personnage de Walt Kowalski un personnage totalement rugueux tant du point de vue psychologique que physique, bougon à l'extrême, à la limite de la caricature, sans pourtant tomber dans le piège d'une indigeste parodie burlesque, et dont chaque réplique est gorgée d'une dose d'humour savamment distillée, révélant peu à peu un homme au grand coeur derrière le masque du vétéran acrimonieux. Peut être ne faut-il y voir que la politesse du désespoir ou la force tranquille de ceux que plus rien n'impressionne, désabusés par la condition humaine. Du grand art pour un magnifique acteur, à voir absolument !
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