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  • 16 août 2010

    Le Palais Idéal du facteur Cheval

    Il y a déjà quinze jours, je préparais distraitement mon voyage en terres d'Evian. En regardant le journal télévisé de treize heures sur TF1 (même pas honte... ) surgit une question existentielle : mais où diable se situe le Palais Idéal du facteur Cheval ? Un petit tour sur Google et la réponse tombe, comme une invitation : à Hauterives, à quelques petits kilomètres de Valence, dans la Drôme. Autrement dit pile poil sur mon trajet ! Depuis le temps que je rêve de voir ce monument hors du commun, l'occasion était trop belle pour la laisser passer. L'histoire du Palais Idéal c'est un peu l'histoire d'un homme perdu dans ses rêves. "Où le songe devient la réalité" est-il gravé sur le fronton d'une entrée coté Ouest. Un travail de titan, oeuvre folle, labeur d'une vie dans laquelle se mêlent fantasmes oniriques et douleurs d'un homme sur lequel le destin semble s'être acharné. Voilà qui est décidé : je ferai halte à Hauterives.

    Après avoir pris la route et quelques centaines de kilomètres plus loin, me voici à Hauterives en milieu d'après midi. Je me gare sur la petite place au centre du village, parmi d'autres badauds, et me laisse guider par le flot de passants allant et venant, se groupant en essaims autour des boutiques souvenirs qui n'ont pas manqué de fleurir un peu partout. Je m'acquitte des droits d'entrée et pénètre dans la cour. Devant moi se dresse  désormais le monumental édifice, ses façades tortueuses, ses reliefs noueux qui lui donnent ici des airs de cascade pétrifiée, là des aspects de palais oriental, là l'allure lointaine des grottes de Petra. Sensation très étrange de voir enfin de mes propres yeux les entrelacements gracieux quasi organiques enfantés par l'esprit d'un seul homme et dont je me délectais naguère sur papier glacé, d'en percevoir les volumes, d'en appréhender la matière, de toucher, sentir, entendre.


    Je me promène posément, flâne, admire une gravure par ici  - "La vie sans but est une chimère" est-il écrit en cercle sur un plafond - me prends à rêvasser par là devant un animal jaillissant de la roche, aime à me perdre dans le "labyrinthe" et ses fascinantes parois recouvertes de sculptures telles des lianes de lierres figées dans la pierre. La lumière est superbe et je prends des dizaines de photos. L'émerveillement est de chaque instants. Tout est profusion, abondance, débordement, folie créatrice, à la limite de la démence.


    Me vient en tête un air du "Trio en la mineur" de Ravel dont j'aurais aimé que l'air fut imprégné à cet instant :

    Oui, cette musique sied parfaitement au lieu. Ce thème presque étrange énoncé au piano, légèrement acidulé, presque hésitant, sur des harmonies un peu étranges ; puis, avec l'entrée du violon, le thème se délie, se déploie, devient généreux, s'humanise au son du violoncelle avant que la fougue, la passion, la douleur n'emportent tout dans leur élan contenu par une puissante introspection. A l'image du Palais. Cette oeuvre  de Ravel date de 1914, soit deux ans après que Cheval a terminé son Palais Idéal. Je n'avais pas fait le rapprochement chronologique sur le moment. Mais après coup je trouve que la concordance est finalement plus que bien heureuse.


    Soyons réalistes, écouter le Trio de Ravel en parcourant le Palais Idéal n'est resté qu'un voeux pieu : au lieu de cela, j'ai droit aux glapissement stridents de gamins survoltés que les parents laissent cavalcader librement dans un joyeux mais insupportable chahut. Tristesse... L'endroit mérite mieux que cela. Tant de beautés et d'étrangetés chimériques s'apprécient au calme d'une contemplation dénuée d'aspérités extérieures. Malgré tout je passe un agréablement moment, dans un endroit placé hors du temps, et voulu comme tel par son auteur.

    Un coup d'oeil à la montre m'extirpe de ma rêverie : il est dix-huit heures. Regagnant ma voiture, guilleret  et la tête pleine d'images, je sais que je reviendrai sûrement en ce lieu. Un jour où je pourrai tenir d'unique compagnie aux pierres esseulées, sous la quiétude d'un ciel d'hiver, parmi le froid et les feuilles mortes.

    En attendant, il me reste encore un peu de route pour rejoindre les bords du Lac Léman où m'attendent Olivier et les moutons.

    16 commentairess:

    1. Je préfère de loin le Trio en la mineur au bien trop connu Boléro.

      Pour construire son palais, Cheval avait une énergie féroce, mais aussi un ego hors du commun. :)

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    2. Oooh c'est un des trucs que je me suis promis de visiter. L'histoire de ce gars est vraiment fascinante !! Ah ça me décide d'autant plus à faire cette visite prochainement. Merci ! :)

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    3. J'ai découvert ce palais par un roman que j'avais lu enfant. Je ne me souviens ni du titre, ni des personnages et encore moins de l'histoire. Je me souviens juste que ça parlait d'une homme, un facteur, construisant un palais en verre. Et peu après, je rêvais devant les images de la série "les Cités obscures" (dont je suis toujous un fan), j'ai donc toujours relié ce fameux palais à un ailleurs fantastique. Fantastique parce qu'ailleurs, ailleurs parce que fantastique. Je n'y suis jamais allé de peur d'être déçu.

      Bon, il est temps que je termine ce *%^@

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    4. Et tout est sorti de son imagination et certainement de lectures car il n'a jamais quitté son village. Il ramassait des caillous au cours de ses tournées de facteur. Je ne l'ai jamais vu en vrai. Il faudra que j'aille y faire un tour.

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    5. voilà un truc qu'il faut que je visite, un jour où je passe dans le "quartier" !!!

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    6. J'en avais entendu parlé mais je crois que je n'avais jamais vu de photo de ce palais, magnifique et surréaliste!!

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    7. Je ne connaissais pas du tout !

      Je rajoute ça à ma liste des choses à voir lors d'un hypothétique voyage Valence-Lyon-Dijon et leurs alentours...

      Merci pour la découverte et les photos :-)

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    8. @ Ô d'Evian : Tu as raison, Cheval devait avoir un ego assez exceptionnel. En attenstent les diverses inscriptions gravées sur les parois du palais : "Cette merveille dont l'auteur peut être fier, sera unique dans l'Univers", ou encore "Travail d'un seul homme".
      On est d'accord pour tonton Maurice.

      @ Matoo : Ho oui, c'est à voir ! Mais je te conseille d'y aller hors periode de vacances estivales. Le site devrait être un peu plus calme. L'audioguide proposé n'est pas absolument nécessaire, je l'ai à vrai dire trouvé un peu léger, même si j'ai appris des choses intéressantes.

      @ Bashô : La meilleure façon de savoir, c'est d'y aller ;)

      @ Gouli : Je ne sais pas si Cheval lisait beaucoup ni quelles étaient ses sources. Le détail intéressant c'est que la carte postale, inventée en 1865, fut autorisée en France en 1872, soit 3 ans avant que Cheval (qui ne l'oublions pas était facteur) ne commence son travail. Et en grand amateur de la Nature, il a dû soigneusement l'observer, ce qui est patant lorsque l'on regarde son travail.

      @ Francis : C'est à voir. Si tu passes dans la région, la halte vaut le coup. Et l'entrée est de 5€uros.

      @ Alban : Tu ne crois pas si bien dire : au début des années 30, il a reçu le soutien moral de plusieurs artistes tels que Pablo Picasso et André Breton, et à travers ce dernier l'admiration des surréalistes.

      @ Kynseker : Chacun son tour de faire découvrir de jolies choses :-)

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    9. Hier soir, "ton" Ravel a accompagné ma lecture des blogs, c'était bien agréable...Quant à la Demeure du Facteur, il me semble l'avoir déja vue dans le passé, mais il est aussi possible que je confonde avec des "clones" !!;-)

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    10. Peut etre un peu loin pour aller chercher du courrier en retard mais c'est en effet une belle découverte que l'univers de cet équidé à la folie douce....

      Stephan

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    11. Je viens d'ajouter une section "lieux" à ma To Do List et celui-ci est le premier que j'y inscris tant tu m'as donné envie. Merci !

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    12. @ Nigloo : Je ne sais pas s'il existe des "clones" du palais Cheval. C'est assez unique en son genre.

      @ Stephan : A la folie douce mais à l'ego très anguleux !

      @ Jonathan D : Tu nous raconteras une fois que tu y seras allé hein !

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    13. Une description poétique et de belles photos qui donnent envie de voir de près ce palais...

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    14. J'ai beaucoup aimé cette visite fort bien écrite. Je me suis très vite replongé dans celle que j'ai fait de ce merveilleux endroit il y a de nombreuses années. J'avais apprécié, sans gamins, hors saison. Il était bien plus qu'un hurluberlu illuminé, c'est une œuvre, ce qu'a fait ce Facteur! J'y avais bien ressenti une aspiration spirituelle, qui ne t'a pas échappé.

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    15. @ Jay : Si tu as l'occasion de passer non loin de là, je te conseille une visite. Ca vaut le détour. Les esprits rêveurs en ont pour leur compte.

      @ Flavien : Tu as raison. Cheval avait même formé le voeux d'être inhumé dans son Palais, ce qui lui a finalement été refusé. Preuve que cette oeuvre était pour lui bien plus qu'une simple édifice. Il a alors construit un monument funéraire dans le cimetière municipal, dans le style du palais, où il repose avec son épouse. Je n'ai hélas pas pris le temps d'aller le voir.

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    16. Je viens de comprendre pourquoi j'adore te lire!

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